Des organisations françaises et allemandes réclament une politique agricole de l’Union européenne plus juste, durable et solidaire

Depuis un an, le groupe thématique d'ingénieurs Agricultures et souveraineté alimentaire (Agrista) travaille au sein de Pour une autre Politique agricole commune. Cette plateforme réunit une trentaine d'organisations à but non lucratif de la société civile d'horizons variés : organisations paysannes, associations de protection de la nature, de l’environnement et du bien-être animal, associations citoyennes ou de défense des consommateurs ou encore de solidarité internationale. Elles sont réunies à l'occasion de l'ouverture des négociations européennes sur la réforme de la Politique agricole commune (PAC) de l'Union Européenne pour son nouveau programme qui devrait aller de 2020 à 2025.
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Plateforme Pour une autre PAC

La plateforme française et son homologue allemande ont formulé à l'occasion d'un Conseil des ministres de l’agriculture de l’Union Européenne (UE) le 16 avril 2018 et dans l’attente de la proposition législative de la Commission européenne sur le cadre financier pluriannuel de l’UE, leurs demandes pour la réforme de la PAC post 2020. Elles attendent des ministres qu’ils·elles se positionnent à Bruxelles en faveur d’une réforme en profondeur de la PAC. La future PAC devra apporter de réelles solutions aux sérieux problèmes rencontrés pour le développement de fermes pratiquant l’agriculture paysanne, dans les pratiques de commerce agricole international, ainsi que dans les domaines de la protection de l’environnement, de la biodiversité, du bien-être animal et de la santé des consommateur·rice·s et des agriculteur·rice·s.

Dans le cadre des négociations pour la politique agricole de l’UE post 2020, la plateforme allemande et la plateforme française Pour une autre PAC, toutes deux composées d’organisations paysannes, de protection de la nature et de l’environnement, de solidarité internationale, de protection des consommateurs et du bien-être animal appellent à une réforme ambitieuse de la PAC. Elles demandent au ministre de l’agriculture et de l’alimentation, Stéphane Travert, au ministre français de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, à la ministre allemande de l’alimentation et de l’agriculture, Julia Klöckner, ainsi qu’à la ministre allemande de l’environnement, Svenja Schulze, de s’employer à défendre les éléments suivants :

  • Toutes les subventions doivent être attribuées selon le principe « argent public pour biens publics », par lequel les paysan·ne·s sont rémunéré·e·s pour des services concrets répondant aux attentes de la société, en matière territoriale, sociale et environnementale, en lien avec la fourniture d’une alimentation saine et accessible pour tous. Relèvent notamment de ces services la restauration de la biodiversité, la protection des sols, de l’eau et de l’air, de la santé humaine et du bien-être animal, ainsi que la lutte contre les changements climatiques. D’autres objectifs sont également à prendre en compte, tels que la pérennisation de l’agriculture paysanne et la diversité des paysages agricoles, en particulier dans les territoires défavorisés, ainsi que la création d’emplois dans l’agriculture comme dans l'ensemble du système alimentaire. Ces objectifs doivent être pensés de façon systémique, dans le but général de créer des territoires vivants et soutenables.

  • Un budget en cohérence avec les objectifs précités doit être fixé au niveau européen. Son allocation ne doit pas être calculée comme une simple compensation de manques à gagner pour les paysan·ne·s ; au contraire, elle doit se traduire par une vraie plus-value pour leurs revenus. Les pratiques agricoles et les systèmes agraires qui contribuent le plus significativement à ces objectifs, telle l’agriculture biologique, doivent également bénéficier d’un soutien particulier au travers de la PAC.

  • Les instruments privés de gestion individuelle des risques, comme les assurances, ne doivent pas être financés par de l’argent public. À la place, davantage de moyens doivent être mis en œuvre, par un accompagnement des paysan·ne·s, pour réduire les risques, par exemple via la diversification des fermes et des territoires, des mesures d’incitation à l’adaptation et à l’atténuation des changements climatiques, à la protection des sols, de l’eau et de la biodiversité, ainsi qu’une répartition de la valeur plus juste au profit des producteurs·trices.

  • L’orientation marquée vers l’export de l’économie agricole et alimentaire européenne, comme de la PAC, est une des causes essentielles de la volatilité croissante des prix et des pertes de revenus engendrées pour les fermes. C’est pourquoi la PAC doit être réorientée, pour répondre aux attentes et demandes croissantes des citoyen·ne·s européen·ne·s vers une alimentation de qualité, saine et accessible. Elle doit aussi contribuer à un commerce international équitable, qui intègre et renforce ces critères de qualité, sans nuire au développement agricole et à la réalisation du droit à l’alimentation dans les pays du Sud.

  • Les plans stratégiques des États membres pour la prochaine PAC doivent être établis de manière à atteindre des objectifs fixés au niveau européen, conduisant à de nécessaires améliorations pour les paysan·ne·s, le bien-être animal, l’environnement et le développement rural. La Commission européenne doit ainsi intégrer dans ses propositions législatives des exigences sociales et environnementales minimales pour les plans stratégiques nationaux. Pour cela, la mise en œuvre de ces derniers par les États membres doit être suivie par un système d’indicateurs orientés vers les réalisations, ainsi que par des moyens de contrôle et de sanction des États.

  • Les instances publiques compétentes en matière d’environnement, de bien-être animal, de santé, d’alimentation, de paysage et de développement doivent être intégrées dans le processus de définition de la PAC, à échelle de l’UE, des États membres et des régions. La participation des acteurs pertinents, issus de la société civile comme du secteur privé, est également à assurer dans le respect du principe de partenariat.

Les organisations signataires insistent sur la responsabilité internationale de la PAC auprès des ministres allemand·e·s et françai·e·s chargé·e·s de l’agriculture et de l’environnement. Elles leur rappellent que les objectifs de la PAC pour la cohérence avec le développement ambitionnent de contribuer aux Objectifs de développement durable des Nations Unies. En outre, dans la perspective du Brexit et en tant que contributeurs nets au budget européen, l’Allemagne et la France doivent remplir leur devoir de solidarité envers les autres États membres.

Elles invitent Julia Klöckner, Svenja Schulze, et Stéphane Travert et Nicolas Hulot à soutenir une politique agricole européenne durable, pour le bénéfice des Européen·ne·s et sans conséquence négative sur les pays du Sud.

Communiqué Paris – Berlin, le 16 avril 2018

17 avril 2018
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