Protéines végétales, tri sélectif & compost : de nouvelles pratiques pour Ingénieurs sans frontières Alès
Victor Lafon (administrateur de la fédération d’Ingénieurs sans frontières) : pouvez-vous revenir sur le contexte dans lequel vous agissez ?
ISF Alès : Notre école, les Mines d'Alès, a commencé l'année dernière une réforme pédagogique qui s'applique pour la première fois aux élèves de première année. Tous les aspects pédagogiques sont remis à plat avec une participation systématique des étudiants aux réflexions, que ce soit sur le monitorat, les méthodes d'enseignement, le développement durable, etc. Nous avons donc intégré le groupe de travail : « Comment mieux insérer le Développement Durable dans l’enseignement ».
VL : Quelles sont les premières actions sur lesquelles vous avez travaillé, et quel est le processus pour décider et faire appliquer un changement ?
ISF Alès : Nous avons commencé par proposer d'insérer dans le parcours de formation des conférences sur l’agroalimentaire ou la géopolitique du développement durable, ensuite nous avons réfléchi à des actions plus « matérielles » comme le tri des déchets et le changement du moteur de recherche par défaut.
La première étape est de prendre contact avec l'administration. Pour changer de moteur de recherche on rencontre l'administrateur réseaux, pour installer le tri sélectif on demande un devis au prestataire chargé du ramassage. Ensuite on présente notre projet aux étudiants en plénière, on explique les raisons pour lesquelles on souhaite ce changement et on fait un sondage. Dans le cas du moteur de recherche on avait la majorité mais il y avait beaucoup de contre, on a préféré laisser tomber. Dans le cas du tri sélectif on avait l'appui de la promo, ça permet aussi de faciliter l'implication dans les projets.
On a d'autres projets, par exemple on souhaite valoriser les déchets organiques du self, aujourd'hui il sont broyés puis injectés directement dans les égouts. Le self a refusé d'utiliser des composteurs classiques, difficiles à gérer du fait des volumes importants. On réfléchit à plusieurs solutions alternatives : ramassage des déchets organiques par un prestataire ou composteur électrique, on se demande aussi ce qu'on fera du compost, on pourrait commencer un potager…
VL : Pouvez-vous m'en dire plus sur le cas particulier des protéines végétales ?
ISF Alès : Nous connaissions plusieurs végétariens, à Ingénieurs sans frontières notamment, et nous avions remarqué que c'était très dur de se nourrir sans protéines animales au self. Notre self était déjà engagé dans une politique d'achats à des producteurs locaux, d'ailleurs nous avons fait un sondage et la plupart des étudiants sont prêts à avoir plus de produits locaux même si c'est un peu plus cher. Nous avons donc proposé d'introduire des repas avec des protéines végétales au self. On est allés voir l'administration et le personnel du self, ils étaient plutôt d'accord pour essayer. Le sondage aux étudiants a lui aussi validé l'idée (on a bien sûr expliqué qu'il y aurait toujours la possibilité d'avoir des repas avec protéines animales).
Aujourd'hui, 1 à 2 jours par semaine, nous avons la possibilité de manger végétarien. Environ 500 repas/jours sont servis au self chaque midi, dont 40 à 50 repas végétariens. Ce sont des steaks ou des pavés composés d'un mélange de végétaux : soja, blé, lentilles etc. Le self est fait de tel manière qu'on choisit d'abord les légumes puis la viande, ce qui oblige à un plat végétarien très « séparé » entre protéines et « non-protéines », ils ne peuvent pas faire une assiette végétarienne complètement différente…
Le prix est le même, environ 4€ pour un repas « plat plus dessert ». Avec le temps on démocratise l'idée et les repas partent suffisamment bien pour que le self poursuive l'expérience, sinon il aurait rapidement arrêté.
VL : Et vous, comment en êtes-vous arrivé à être « flexitarien », à faire le choix de consommer moins ou peu de viande ?
Boris Nerot : Pour ma part ce n'était pas pour le bien-être animal, mais plutôt pour le réchauffement climatique. En effet notre consommation de protéines animales participe énormément aux émissions de gaz à effet de serre. Au début j'ai arrêté le bœuf, car c'est la filière qui a le plus d'impact, ensuite le porc, et enfin le poulet à cause des vidéos sur l'élevage intensif. Quand je suis en famille ou invité chez des amis je ne refuse pas pour autant la viande, je ne souhaite pas que ça me « complique la vie ».
Benjamin Le Franc : Au début j'ai boycotté des marques comme McDonald's, ensuite j'ai vu des vidéos sur les abattoirs et j'ai décidé de limiter ma consommation de viande. Aujourd'hui je le fais principalement pour l'environnement, mais je pense aussi que c'est bon pour la santé. Je n'achète pas de viande moi-même, mais j'en mange dans ma famille (et elle est bio).
Briac Le Guillou : Un peu comme les autres, environnement, condition animale et santé. Je crois vraiment au pouvoir du consommateur et du boycott. Je pense qu'il faut encourager et renforcer le contre-pouvoir citoyen.
VL : D'autres projets en vue ?
ISF Alès : L'administration est demandeuse d'idées de notre part sur le sujet des déplacements. Aujourd'hui la maison des élèves (résidence étudiante) est à 30 min à pied de l'école et il n'y a pas de bus. Certains prennent le vélo, mais la plupart y vont en voiture.
Le matin les gens attendent à la sortie du parking et toutes les voitures prennent entre 4 et 5 personnes. C'est du « covoiturage à l'arrache », ce n'est pas toujours très pratique mais nous ne sommes pas sûrs de pouvoir trouver une meilleure solution, avec un impact environnemental moindre…
Pour plus d'information sur les changements possibles dans les restaurants universitaires : http://refedd.org/wp-content/uploads/2016/03/Des-menus-responsables-dans-votre-restaurant-universitaire.pdf