Pour une université ouverte à tous·tes

"Bienvenue en France", c'est le nom donné à la nouvelle stratégie de l'Enseignement Supérieur Français pour les étudiant·es étranger·ères. Le projet de loi vise officiellement à attirer plus d'étudiant·es étranger·ères (de 300 000 actuellement à 500 000 en 2027) en annonçant de meilleures conditions d’accueil. Néanmoins, des syndicats, organisations étudiantes, conseils d'administrations d'universités et de grandes écoles, et de nombreux·ses citoyen·nes alarment sur les dangers de cette loi pour les étudiant·es extra-communautaires mais aussi pour l'enseignement supérieur et la recherche française en général. En effet, l'amélioration des conditions d’accueil se fera au prix de l'instauration de frais différenciés (plus élevés) pour les étranger·ères.
Illustration_Article
Paris le 6 février 2018. Journée de grève et d’action contre la réforme du lycée et de l’université. Pour le maintien du bac comme diplôme national et pour l'abandon du plan Etudiant (projet de loi Vidal).
Force Ouvrière

Un projet de loi  produisant de nouvelles inégalités et perpétuant les préjudices envers les étranger·ères

A la rentrée 2019, les frais de scolarité des étudiant·es extra communautaires vont  passer de 170€ à 2770€ par an en Licence et de 243€ à 3770€ par an en Master1. Cette hausse instaure une séparation entre les étudiant·es en  fonction de leur pays, en plus d’en instaurer une sur leur revenus. C’est un coup supplémentaire porté à l’éducation supérieure, censée permettre à toutes et tous de gravir les échelons sociaux. Après « Parcoursup » et la loi ORE « Orientation et réussite des étudiants », cette loi nous rappelle que le gouvernement ne construira pas de nouvelles places pour les jeunes toujours plus nombreux·ses à souhaiter faire des études. Il faut sélectionner les meilleur·es, que ce soit par un prétendu mérite avec des algorithmes comme « Parcoursup » ou par l’argent avec « Bienvenue en France ».

Le gouvernement justifie la mesure en avançant l’idée que ces étudiant·es étranger·ères ne payeraient pas d’impôts en France, et rentreraient dans leur pays d’origine à la fin de leurs études. Or, outre la TVA, ou encore les frais des visas et autres démarches administratives, de nombreux·euses étudiant·es etranger·ères travaillent, payent des impôts et cotisent en France, soit à temps partiel soit en doctorat. Au final, l'apport des étudiant·es étranger·ères à l'économie française dépasse les dépenses de l’État qui leurs sont affectées2. Et quand bien même, réduire la question de l'accessibilité aux formations et à l'éducation à un calcul financier amène à douter de la vision sociétale du gouvernement. En effet, les étudiant·es extra-communautaires permettent aussi un apport d'une vision différente et enrichissante au monde universitaire et de la recherche. La diminution de leurs effectifs3 en raison de la hausse des frais d'inscription menace aussi de fermeture des licences et des masters, réduisant donc l'offre de formation des universités françaises pour tous·tes les étudiant·es .       

Par ailleurs, de par son discours, le gouvernement contribue une fois de plus à perpétuer un imaginaire négatif de l'étranger·ère : coûteux·se, assisté·e et éloigné·e des valeurs de la République Française. Mais attention car tous·tes les étranger·ères ne sont pas égaux·ales, les portes étant toujours ouvertes à celles et ceux qui ont les moyens de financer ces formations à prix exorbitants !

 

Mobilisations et luttes

Les syndicats et organisations étudiantes ont rapidement dénoncé ce projet de loi, vite suivi par les syndicats de l'enseignement et de la recherche. Des appels à manifester se sont ajoutés aux pétitions et appels intersyndicaux à la mobilisation4

Plusieurs universités se sont elles aussi opposées à l'augmentation des  frais pour les étudiant·es extra-communautaires en déclarant qu'elles n'appliqueraient pas cette augmentation, s'inscrivant dans  la défense d'une éducation accessible à tous·tes. Ce sont à ce jour plus de 17 universités5 ou grandes écoles, comme l'INSA de Lyon6, qui ont déclaré leur opposition à cette loi. Face aux mobilisations, la ministre Frédérique Vidal insiste sur le "devoir d’obéissance et de loyauté" des universités, des fonctionnaires et des personnels administratifs7.

 

Et nous?

Ingénieurs sans Frontières rejoint ces critiques du projet de loi qui s'oppose à ses valeurs de solidarité, à sa vision d'une éducation accessible à toutes et tous et à son Manifeste pour une Formation Citoyenne des Ingénieur·es. Il nous parait indispensable pour participer à la construction d'un monde plus juste de permettre à tous·tes d'étudier sans distinction d'origine géographique ou de classe sociale.

 

Comment se mobiliser?

* Pétition lancée par des organisations étudiantes dont de nombreuses organisations d'étudiant·es étranger·ères à signer ici.

* Comme les étudiant·es de l'INSA Lyon, vous pouvez encourager votre directeur·rice et vos élu·es étudiant·es au conseil d'administration de votre école à se positionner contre cette loi.

* Rejoindre les manifestations : une cartographie des mobilisations est disponible ici.

Si vous ou votre groupe local souhaite se mobiliser, n'hésitez pas à nous contacter: bureauSANS@POURRIELlist.isf-france.org ou eduardo.palmieriSANS@POURRIELisf-france.org (Retirer les mots SANS et POURRIEL des adresses mail indiquées).

 

Sources et lectures intéressantes :

1 "Bienvenue en France": la stratégie d'attractivité pour les étudiants internationaux : http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid136251/-bienvenue-en-france-la-strategie-d-attractivite-pour-les-etudiants-internationaux.html

Contre-argumentaire à l’augmentation des frais d’inscription pour les étudiants étrangers - SLU ! : http://www.sauvonsluniversite.fr/spip.php?article8477

Frais d’inscription des étudiants étrangers : des ajustements à l’étude : https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/02/18/frais-d-inscription-des-etudiants-etrangers-des-ajustements-a-l-etude_5425016_3224.html

Appel Intersyndical - 18 janvier 2019 - Mobilisons-nous pour obtenir l'annulation de la hausse des frais d'inscription (...) : http://www.sauvonsluniversite.com/spip.php?article8474

17 Universités refusent la hausse des frais de scolarité : https://www.bastamag.net/Frais-de-scolarite-des-etudiants-etrangers-17-universites-refusent-la-hausse?fbclid=IwAR1S_H2Kt-Ucs-CGC1iZQYi4jDyDRqrpkTG68_Fyl_XsV-2eFCJE8Y811RQ

L'INSA Lyon s'oppose à la hausse des frais d'inscription : http://lyonbondyblog.fr/LBB/linsa-soppose-a-la-hausse-des-frais-dinscription-pour-les-etudiants-etrangers/

Une ministre française recadre les universités qui n'augmenteront pas les frais d'admissions pour les étudiants étrangers : https://www.huffpostmaghreb.com/entry/une-ministre-francaise-recadre-les-universites-qui-naugmenteront-pas-les-frais-dadmissions-pour-les-etudiants-etrangers_mg_5c40b66de4b027c3bbbf1abb

Frais de scolarité dans l’enseignement supérieur. Arguments et résistance internationale : http://www.sauvonsluniversite.com/spip.php?article8451

Solidaires Etudiant-e-s dénonce la concertation et appelle à se mobiliser le 5 et 7 février : https://www.solidaires-etudiant.org/blog/2019/01/28/solidaires-etudiant-e-s-denonce-la-concertation-et-appelle-a-se-mobiliser-le-5-et-le-7-fevrier/

Des universités n’appliqueraient pas la hausse des frais d’inscription ? De la « poudre de perlimpinpin » ! : https://www.solidaires-etudiant.org/blog/2019/02/04/des-universites-nappliqueraient-pas-la-hausse-des-frais-dinscription-de-la-poudre-de-perlimpinpin/

Hausse "discriminatoire" des frais de scolarité : des universités françaises appellent au retrait du projet de loi : https://www.huffpostmaghreb.com/entry/hausse-discriminatoire-des-frais-de-scolarite-des-universites-francaises-appellent-au-retrait-du-projet-de-loi_mg_5c08ca5fe4b069028dc679d4

 

**Etudiant·es extra-communautaires = étudiant·es originaires de pays non-membres de l'Union Européenne.*

25 février 2019
Bureau National d'ISF
Thématique 
Catégorie