Note de positionnement sur le sexisme à Ingénieurs sans frontières
Le comité FeminISF, qui a pour rôle de définir et développer la thématique du sexisme au sein d’Ingénieurs sans frontières, a été créé en septembre 2017. Ce comité avait pour objectif initial de réfléchir à la manière dont cette thématique devait être abordée dans notre association : axes de travail pertinents, positionnements, sensibilisation. Deux ans et demi plus tard, le bilan est positif :
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Un parcours de 4 ateliers aux RESIC 2018, un atelier pendant les RESIC 2019 ;
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Un JESSI en janvier 2019 à Lille dont la thématique a été co-portée entre les comités FormIC et FeminISF ;
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Une réflexion sur l’écriture inclusive : un choix sur le type d’écriture à utiliser au sein d’ISF, dans quels documents l’utiliser, complété par une formation des salarié·es et une relecture systématique des Alteractifs ;
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Auto-formation des membres du comité sur différents sujets liés à la thématique : questions trans et transidentité, lien avec le handicap, lien avec l’interculturalité, travail en mixité ;
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Constitution de base de données documentaires pour s’informer et diffuser ;
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Création d’un groupe privé sur facebook « Femin’ISF » afin de continuer l’auto-formation et y intégrer des membres de groupes locaux ;
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Travail avec des membres de groupes locaux afin de partager sur des idées de sensibilisation pouvant être réalisés dans leurs écoles pendant les RESIC 2020 ; formalisation d’un guide de sensibilisation accessible sur le wiki (en cours) ;
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Rédaction en lien avec le Conseil d’Administration et validation en Assemblée Générale (décembre 2019) d’une note de positionnement sur le sexisme à ISF.
C’est ce dernier projet que nous développerons dans cet article.
Pendant l’année 2018, deux ateliers d’introduction ont été réalisés pendant les réunions du conseil d’administration (CA) d’avril et juin, afin de commencer à sensibiliser les membres du CA qui ne seraient pas familier·ères de la thématique, et de proposer un premier texte ouvert aux commentaires pendant le CA ouvert.
Cette première année de rédaction et d’expérimentation a été considérée par le CA comme peu démocratique et la thématique encore trop peu partagée par l’ensemble de la fédération.
L’année 2019 a donc été centrale pour le développement de cette dernière au sein de la fédération. Elle a démarré par un JESSI, une cinquantaine de membres de groupes locaux étaient présent·es. La thématique du sexisme étant déjà connue de nos membres, de près ou de loin, ce week-end de formation a permis de développer plus précisément certains sujets.
Une commission a été créée en 2019, au sein du conseil d’administration, afin d’accompagner le comité FeminISF dans une démarche démocratique de validation d’une note de positionnement sur le sexisme, afin d’assurer un partage plus large dans l’ensemble de la fédération.
En lien avec le CA, une consultation de tous·tes les membres de la fédération a eu lieu afin de recueillir les avis sur les différents points qui seraient abordés dans la note. 95 personnes ont participé à cette consultation, dont 55 % issus de groupes locaux. Le détail des résultats de la consultation est disponible en pièce-jointe de cet article. Les sujets abordés étaient : le féminisme et les projets internationaux, l’intersectionnalité à ISF, les actions de sensibilisation, le sexisme spécifique dans le milieu ingénieur, la posture de l’ingénieur·e, l’implication d’ISF dans les écoles d’ingénieur·es, la non-mixité, les différents courants du féminisme.
Cette consultation nous a permis d’apporter des modifications à la note initiale, de développer de nouvelles thématiques que nous n’avions pas prévu d’aborder ; après deux aller-retours supplémentaires entre le CA et le comité, le texte a pu être finalisé. Finalement, nous avons simplifié les explications concernant la posture de l’ingénieur·e et le sexisme spécifique dans le milieu ingénieur, mis en annexe les modalités d’actions du comité, et allégé certaines définitions (non-mixité notamment).
Nous avons convenu que, bien que l’intersectionnalité soit une question importante et proche du sexisme, nous ne prendrions pas position dessus (car nous sommes majoritairement des ingénieur·es blanc·hes) mais que cela ne nous empêcherait pas d’informer et de sensibiliser autour de ces questions, ou encore de relayer des positions si nous étions sollicité·es. De la même manière, nous ne pouvons pas accompagner des projets à l’international dont la composante principale porterait sur le sexisme, du fait de notions d’interculturalité trop complexes à appréhender. En revanche intégrer des notions de sexisme dans la formation interculturalité nous apparaît comme indispensable, pour que nos adhérent·es partant à l’étranger aient une première formation dans ce domaine.
Concernant les axes liés aux modalités d’actions dans les écoles ingénieures, la participation d’ISF nous semble primordiale, d’autant plus qu’il est aisé de constater la pauvreté du milieu associatif en école d’ingénieur·e à ce sujet. Des partenariats avec d’autres associations peuvent se révéler très intéressants pour enrichir le débat. De la même manière, les groupes locaux ISF peuvent être des leviers auprès des administrations des écoles afin de les pousser à mener de réelles politiques de prévention des pratiques de harcèlement et de violences sexuelles. ISF ne se positionne pas comme experte dans ce domaine, mais plutôt facilitatrice. D’autres associations sont spécialisées dans cette typologie d’actions (accueil de victime, conseil juridique, prévention…), et les groupes ISF doivent pouvoir mettre en lien écoles et associations spécialisées. Le comité FeminISF est prêt à accompagner des groupes locaux dans de telles démarches.
Bien que le comité FeminISF soit volontairement un groupe non-mixte, le Conseil d’Administration d’ISF n’a pas voulu imposer de règles aux groupes locaux, pour respecter une posture d'accompagnant. Le travail en non-mixité a pour objectif de s’affranchir des rapports de domination pouvant s’exprimer dans un groupe mixte. Cette méthode permet d'enrichir les débats différemment une fois regroupé·es à nouveau en mixité. La note de positionnement met donc en avant le concept de non-mixté comme bonne pratique, pas comme un impératif pour les groupes locaux.
Il nous est apparu essentiel que notre note se positionne par rapport à des courants généraux féministes. En effet les expressions du sexisme comme des courants féministes peuvent être très différents d’une personne à une autre, et peuvent faire appel à des idéologies parfois contraires. Les deux courants co-existants sont le matérialisme et l'essentialisme. Les courants de pensée matérialistes considèrent que ce sont les rapports sociaux qui créent des classes s'exprimant par des rapports de domination et des ressources inégalement réparties. Les courants de pensées essentialistes considèrent que les classes sociales préexistent à ces rapports sociaux et doivent s’expliquer par des critères biologiques ou psychologiques. Comme expliqué dans la note, "le comité FeminISF est ouvert à des démarches de croisement de luttes avec d’autres associations, et se positionne comme un comité féministe pro choix, inclusif et intersectionnel allié des luttes pour la justice sociale et environnementale", et se reconnaît donc dans les courants de pensées matérialistes.
Une bibliographie avec explication de certains termes de vocabulaire précis est en cours de rédaction et sera jointe à la note sur le site internet d’ISF lorsqu’elle sera terminée.
Le sexisme joue un rôle politique majeur, en tant que vecteur d’organisation sociale. Il était donc important qu’ISF s’empare de cette thématique, la fasse sienne, et que nous exprimions ce que nous voulions en faire. La note de positionnement sur le sexisme validée en Assemblée Générale en décembre 2019 vient apporter sa pierre à l’édifice des réflexions constituant le socle des valeurs d’ISF. Il convient à présent de faire vivre cette thématique car le combat n’est pas fini, que ce soit à l’extérieur et même au sein de l'association.
Le comité FeminISF