Migrations environnementales : découvrir le collectif "des ponts pas des murs"
Interview d’Henri Lefebvre, chargé de projet sur les migrations, afin d’en savoir plus sur les actions du CRID liées à cette thématique. Propos recueillis par Margot Chatard, chargée de projet à ISF.
Quelles sont les actions du CRID sur les migrations ? Quel est son rôle ?
Le CRID occupe un rôle d’appui à la construction des mouvements sociaux. Par exemple, lors des « états généraux sur les migrations », organisés pour la première fois en 2018, en réaction aux politiques migratoires du gouvernement de l’époque, ce sont plus de 500 personnes qui se sont réunies afin de voter un manifeste commun. L’objectif de ce texte était de défendre des politiques migratoires plus respectueuses des droits et promouvoir la justice entre les peuples, partant du principe que la mobilité internationale ne doit pas être le privilège de quelques un·es. Ce réseau s’est pérennisé et une centaine d’associations en sont aujourd’hui membres. Le CRID participe toujours à son animation. À une autre échelle, les forums sociaux mondiaux et européens des migrations permettent de dégager des axes de travail communs. Par exemple, le forum social européen des migrations, qui devait se tenir à Lisbonne en mars 2021 et a finalement eu lieu en ligne, a permis de dégager 12 propositions concrètes communes aux organisations européennes, afin de mener des actions en lien avec les migrations. Pour les organisations françaises, l’enjeu principal qui est ressorti de ce rassemblement concerne la nécessité d’agir contre les manquements aux droits humains observables aux frontières européennes.
Peux-tu nous parler un peu plus précisément du réseau « des ponts pas des murs » ?
Le but de ce groupe de travail est de partager des informations et des positionnements au sein d’associations internationales. Depuis trois ans, l’action de « des ponts pas des murs » s’est focalisée sur les migrations environnementales. Né en 2008, lors d’un sommet international sur les migrations et souhaitant se placer à rebours des politiques du moment portant sur le contrôle des migrations, le groupe a décidé d’organiser un contre-sommet citoyen. La constitution du groupe dépasse les membres du CRID, avec des organisations syndicales, ou d’autres centrées sur le climat.
Comment la question des migrations environnementales s’est imposée comme la thématique centrale ?
La thématique des migrations environnementales est devenue centrale, dans le sens où il y avait un besoin de construire une position commune. Le changement environnemental est considéré comme un facteur important dans les dynamiques migratoires, mais il n’agit pas seul, il y a toujours une multitude de facteurs. Au sein des mouvements climat, on entendait notamment beaucoup parler des risques de « submersion » de personnes migrant·es du fait des problématiques climatiques. Nous voulons démonter ces idées reçues et adopter un discours qui prenne en compte l’ensemble des risques encourus par les personnes dans le monde. En effet, il y a un enjeu d’intersectionnalité des luttes : il est primordial de trouver un discours commun, un discours responsable sur le changement climatique, qui ne contribue pas à renforcer les injustices migratoires. Ce qui est très important pour nous, c’est la justice liée aux migrations. Si vous voulez en savoir plus sur les actions en cours au sein de la commission, un document intitulé « les migrations environnementales pour les nul·le·s »(1) est paru, afin de vulgariser le sujet. Une cartographie sera bientôt disponible, afin de recenser les associations et actions menées sur les migrations environnementales en France et à l’international. Ce travail sera publié à l’été et permettra de voir quel rôle peut tenir « des ponts pas des murs » en complémentarité de ce qui est fait par ces associations.
1. https://crid.asso.fr/les-migrations-environnementales-pour-les-nul%c2%b7le%c2%b7s/